Faut-il être un acteur omnicanal ou un pure player du digital quand on fournit de l’épicerie ou des produits frais aux restaurants ? La troisième édition du Food Service DDay réunissait un acteur de chaque camp. Récit de la « battle ».
Seuls 18 % des restaurateurs indépendants ont recours au e-commerce (étude e-commerce 2019, Food Service Vision). Même si cette proportion est appelée à doubler dans les prochaines années, elle reste faible. Pour Emmanuel Argoud, directeur associé à Food Service Vision, « la commande en ligne est une pratique clivante pour la profession. 64 % des restaurateurs ne veulent pas avoir recours à l’e-commerce. Leur défiance porte sur la qualité des produits et leur disponibilité. Ils estiment aussi avoir plus de marge négociation au téléphone. »
Dans l’étude de Food Service Vision dont sont tirés ces chiffres, quatre sites dominent le marché : Metro, Promocash, TransGourmet et Amazon. Sans surprise, les catégories de produits les plus commandés sont aussi celles qui se conservent le mieux avec, dans l’ordre, l’épicerie, l’hygiène, les surgelés et les produits frais.
Pomona : le digital, troisième corde à son arc
Leader de la distribution livrée de produits alimentaires pour les métiers de bouche, Le Groupe Pomona a ajouté la commande en ligne il y a maintenant trois ans à ses canaux « historiques », la télévente et la force de vente terrain. Pas d’autoconcurrence, cependant : les trois canaux de distribution proposent les mêmes produits, les mêmes tarifs, les mêmes promotions.
Pour Carole Colin Kjaer, directrice du développement, de l’innovation et du marketing du Groupe Pomona, l’avenir passe par l’omnicanalité. « Certains clients refusent l’e-commerce. Attachés au lien humain, ils ont confiance en leur commercial ou leur télévendeuse, qui leur donne des conseils en termes de prescription. »
Pour inciter ces réfractaires à commander en ligne, Le Groupe Pomona met en avant l’intérêt à créer un compte. Gagnant en autonomie et en flexibilité, le client retrouve dans son espace personnalisé ses factures et l’historique de ses commandes. Il accède aussi aux promotions, aux disponibilités de stocks. « Avant, pour avoir ces informations, il devait téléphoner ou attendre le passage du commercial, poursuit Carole Colin Kjaer. Et puis le digital élargit l’amplitude horaire : on voit des pics de vente le dimanche tard le soir, après le service. »
Mais, reconnaît Carole Colin Kjaer, les freins sont aussi internes. « La mis en place de la télévente à l’époque avait créé une rivalité avec les commerciaux terrain, poursuit-elle. Là, le digital est perçu comme une nouvelle concurrence. Il faut mener de grands efforts de communication et de conduite de changement pour expliquer qu’il y a complémentarité des canaux de contact. »
Les télévendeuses ont déjà vu l’intérêt à ne plus faire autant de saisie de commande pour se concentrer sur la vente et le conseil. Les commerciaux terrain bénéficient, eux, de recommandations pour augmenter leurs ventes, l’exploitation des données permettant de dégager des similitudes dans les comportements d’achat.
Être Gourmand, du BtoB au BtoC
Créée il y a cinq ans, Être Gourmand est venue au BtoB sous la pression du marché. Épiciers, cavistes, restaurateurs, hôteliers étaient de plus en plus nombreux à se rendre sur cette épicerie fine en ligne, jusqu’alors réservée aux particuliers. La start-up a donc dupliqué son modèle BtoC pour donner naissance à Être Gourmand Pro, avec un accès restreint aux seuls professionnels. Si la commande est 100 % digitale, un numéro de téléphone d’assistance et un module de chat permettent de qualifier la demande.
Pour Alexandre Bardin, président fondateur de l’enseigne, les restaurateurs apprécient de n’avoir qu’un seul interlocuteur et qu’une seule facture en passant par sa plateforme plutôt que de devoir traiter avec plusieurs artisans. « Quant à nos fournisseurs, complète-t-il, 80 % n’ont pas de canal de commande en ligne. Il a été facile de les convaincre. »
Si la marge est plus faible dans le BtoB, le panier moyen est en revanche plus élevé. « Les professionnels sont aussi très fidèles. À la différence du marché des particuliers, où il faut sans cesse se battre sur les tarifs, le référencement naturel, l’achat de mots-clés sur Google… » La start-up joue aussi sur les synergies entre ses deux activités. Grâce au BtoC, elle peut dire aux professionnels que tels produits sont achetés par telle clientèle.
Le Groupe Pomona comme Être Gourmand montrent que le e-commerce bouscule avec une vigueur croissante les habitudes et les réflexes des professionnels du secteur. « Change or die », dit-on souvent à propos de la transformation numérique, quelque soit le secteur. Le food service n’échappe pas à cet adage.
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